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  1. wallop dit :

    Cadre légal de l’indemnisation en cas d’expropriation
    L’indemnisation du propriétaire exproprié revêt en droit français une dimension particulièrement protectrice, opérant l’articulation entre la nécessité publique et la garantie du droit de propriété. Cette articulation puise sa source à l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789, pilier constitutionnel selon lequel nul ne peut être privé de sa propriété si ce n’est pour cause d’utilité publique, et « moyennant une juste et préalable indemnité » .

    Principes essentiels
    L’expropriation, procédure administrative particulière permettant pour utilité publique la dépossession forcée d’un propriétaire, exige deux conditions majeures : l’existence d’une utilité publique constatée préalablement, puis la fixation d’une indemnité intégrale, juste et préalable.

    Cette indemnité vise à replacer l’exproprié dans une position équivalente à celle qui était la sienne avant la dépossession.

    Selon le Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, l’indemnité doit réparer « l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation » (ancien art. L. 13-13 devenu L. 321-1), englobant donc la valeur de marché, mais aussi, selon le cas, des préjudices accessoires directement et matériellement liés à la dépossession.

    Détermination de la valeur du bien
    Date de référence
    La date à laquelle le bien exproprié doit être estimé est déterminée à la date de la décision de première instance, c’est-à-dire à la date à laquelle le juge statue sur la fixation de l’indemnité.

    Toutefois, le contenu et l’usage du bien sont appréciés à une « date de référence », généralement fixée un an avant l’ouverture de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique.

    Ceci permet de prévenir les phénomènes spéculatifs consécutifs à l’annonce d’opérations publiques. La jurisprudence de la Cour de cassation confirme la nécessité de se placer à la date de la décision de première instance pour fixer le montant de l’indemnité.

    Consistance et usage effectif
    La consistance du bien (surface, état, affectation réelle) est appréciée à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété, tandis que son usage effectif (notamment sa constructibilité) l’est à la date de référence, ce qui recouvre l’ensemble de ses potentialités urbanistiques et foncières constatées à ce moment précis.

    Il est exclu de tenir compte des changements de valeur postérieurs à la date de référence, s’ils résultent de la perspective du projet public ou de modifications anticipées des règles d’urbanisme suscitées par ce même projet.

    Méthode d’évaluation
    La valeur vénale – soit la somme qui pourrait être effectivement obtenue pour le bien sur le marché libre à la date de référence – constitue la base de l’indemnité principale.

    Les experts s’appuient principalement sur la méthode de comparaison directe : analyse de la valeur des biens similaires cédés dans la même zone géographique, corrigée en fonction des caractéristiques propres (emplacement, surface, état, servitudes, qualité de la desserte).

    Conformément à l’article R. 311-22 du code de l’expropriation, le juge statue dans la limite des prétentions des parties, sur la base des éléments de comparaison les plus pertinents.

    Ajustements et exclusions
    Ne sont pas pris en compte dans le calcul de l’indemnité :
    – Les plus-values consécutives à la réalisation ou à l’annonce du projet (plus-value spéculative).
    – Les améliorations réalisées après la date de référence, sauf si elles étaient indispensables à la destination du bien ou dues à son entretien normal.

    Abattements
    Des abattements peuvent être opérés, par exemple pour occupation, pour pollution, ou pour démolition, à la condition qu’ils soient justifiés en fonction de la consistance réelle du bien et de ses charges
    .
    Analyse avancée du calcul de l’indemnité d’expropriation
    Structure de l’indemnité : principale et accessoires
    Indemnité principale
    L’indemnité principale correspond à la valeur vénale du bien exproprié en l’état où il se trouve à la date de référence (selon les principes précités). – Elle est fixée, à défaut d’accord amiable, par le juge de l’expropriation, qui procède à une visite des lieux, entend les parties et s’appuie sur les rapports d’expertises

    . – Sont pris en considération : la nature du bien (terrain, bâtiment, fonds de commerce), son usage effectif, sa situation, sa surface, son état, les servitudes le grevant, et son environnement immédiat

    .
    Exemple de calcul
    Si un appartement de 60 m² à Paris, estimé à 10 500 €/m² en 2023, correspond à la date de référence, l’indemnité principale serait d’environ 630 000 € pour l’ensemble du bien

    .
    Indemnités accessoires
    Complètent l’indemnité principale, les indemnités accessoires destinées à compenser de manière précise les préjudices additionnels et frais directs subis du fait de la privation du bien

    : – Indemnité de remploi (pour couvrir les frais générés par l’acquisition d’un nouveau bien équivalent, incluant droits de mutation, notaire, frais de recherche…) – Frais de déménagement – Indemnité pour perte d’exploitation (pour commerçants ou agriculteurs) – Indemnité pour trouble de jouissance – Indemnité pour dépréciation du surplus en cas d’expropriation partielle, etc. Chaque indemnité accessoire doit être justifiée par un préjudice réel, matériel et certain, et faire l’objet d’une évaluation propre sur justificatifs et/ou expertise

    .
    Focus sur l’indemnité de remploi
    La majorité du contentieux porte sur l’indemnité dite « de remploi », destinée à compenser les frais normaux encourus lors de l’acquisition d’un bien équivalent

    . Elle est essentiellement calculée, en pratique, selon un barème usuel accepté par la jurisprudence récente, soit : – 20 % sur la tranche allant jusqu’à 5 000 € – 15 % de 5 001 à 15 000 € – 10 % au-delà de 15 000 € Cet abattement se calcule sur la base de l’indemnité principale, c’est-à-dire la valeur vénale nette d’indemnisation

    . Par exemple, pour une indemnité principale de 100 000 € : – 20 % x 5 000 € = 1 000 € – 15 % x 10 000 € = 1 500 € – 10 % x 85 000 € = 8 500 € – Total de l’indemnité de remploi : 1 000 + 1 500 + 8 500 = 11 000 € Elle est due, en principe, même si le propriétaire exproprié ne rachète pas immédiatement un nouveau bien, sauf preuve d’une intention initiale de vente ou de mise en vente effective du bien au cours des six mois précédant la déclaration d’utilité publique (article R. 322-5 du code de l’expropriation)

    .
    Indemnisation des expropriations partielles
    L’expropriation ne touchant qu’une partie du bien (terrain ou bâtiment) ouvre droit à une indemnisation spécifique, pour la perte de valeur du surplus éventuellement inutilisable dans des conditions normales, appelée indemnité de dépréciation du surplus ou d’emprise totale si l’exproprié le demande et la fraction restante n’est plus utilisable (articles L. 242-1 et suivants du code de l’expropriation)
    .
    Décisions du juge de l’expropriation
    Conformément aux articles R. 311-22 et L. 322-2 du code, le juge dispose d’un pouvoir souverain dans l’évaluation du bien et la fixation des indemnités, mais dans la limite des prétentions des parties

    . Il peut, pour ce faire, retenir la méthode d’évaluation qu’il estime la plus conforme à la réalité économique du marché et aux éléments d’espèce : – Méthode comparative (pour la plupart des cas)

    , – Méthode de capitalisation des revenus (pour les biens générateurs de revenus)

    , – Méthode par coût de remplacement/reconstruction (exceptionnellement, pour des bâtiments particuliers ou historiques)

    . Le juge prend également en compte les abattements nécessaires pour occupation ou état du bien, et applique, s’il y a lieu, des abattements pour pollution, démolition, ou tout autre coût qui affecte la valeur réelle du bien
    . Les accords amiables, sauf s’ils réunissent la majorité qualifiée des propriétaires (double majorité), ne s’imposent pas au juge, qui statue in abstracto pour garantir le principe d’égalité entre expropriés
    .
    Procédure de fixation et de paiement des indemnités
    Tentative préalable de règlement amiable
    L’expropriant est tenu, avant toute saisie du juge, de proposer une indemnité au propriétaire. Celui-ci dispose d’un délai (en général un mois) pour accepter ou formuler une contre-proposition

    . En cas d’échec des négociations, l’affaire est portée devant le juge de l’expropriation.
    Évaluation judiciaire
    Le juge organise une visite des lieux et une audience contradictoire au cours de laquelle les parties peuvent présenter leurs arguments et contre-expertises

    . Sa décision prend la forme d’une ordonnance judiciaire indiquant clairement le montant et la ventilation des sommes allouées, conformément aux règles précitées. La jurisprudence insiste à la fois sur la liberté du juge dans le choix des comparaisons et sur la nécessité d’une motivation appropriée, surtout en cas de rejet partiel des demandes des parties ou d’écart par rapport aux termes de référence avancés
    .
    Paiement et contestation
    L’indemnité doit être payée ou consignée avant toute prise de possession réelle du bien par l’expropriant, ainsi que l’exige le caractère « juste et préalable » de l’indemnisation

    . Le paiement effectif conditionne la faculté d’expulsion de l’ancien propriétaire. Le non-paiement dans les délais entraîne, sur demande, production d’intérêts au taux légal à compter de la demande formelle (article R. 323-14 du code de l’expropriation)
    . Le propriétaire insatisfait de l’indemnisation peut former appel, et dispose, sous certaines conditions, de recours en cassation. Depuis un revirement opéré par la Cour de cassation, les modalités de recours sont rationalisées (Cass. Civ. 3e, 16 janvier 2025, n° 23-21.174 )

    .
    Traitement fiscal
    Les indemnités d’expropriation constituent, à l’égard de leur bénéficiaire, une opération assimilée à une vente imposable, pour la détermination de la plus-value de cession, à l’exception des sommes précisément allouées au titre de la dépréciation du surplus en cas d’expropriation partielle
    .
    Illustration concrète : Étapes et exemple de calcul
    Schéma synthétique
    Étape Opération Date de référence Modalité de calcul
    Négociation amiable Proposition d’indemnité puis contre-offre Etat du bien au jour de l’offre Sur la base d’expertises ou de l’évaluation Domaines
    Saisine du juge Audience, contre-expertises, visite Date de première instance Méthode de comparaison principalement
    Décision judiciaire Ordonnance fixant l’indemnité principale et les accessoires Voir ci-dessus Application des règles précédentes
    Paiement Versement effectif ou consignation ; intérêts si retard Après la décision définitive Au taux légal
    Exemple chiffré synthétique
    Supposons un bien en zone rurale bénéficiant d’une estimation de 2 500 € le m², surface de 100 m² : – Indemnité principale : 250 000 € – Indemnité de remploi selon barème usuel : – 20 % de 5 000 € = 1 000 € – 15 % de 10 000 € = 1 500 € – 10 % de 235 000 € = 23 500 € – Total = 1 000 + 1 500 + 23 500 = 26 000 € Indemnité globale avant autres accessoires : 276 000 €. D’autres préjudices indemnisables (déménagement, perte d’exploitation, trouble de jouissance, dépréciation du surplus s’il s’agit d’une expropriation partielle, etc.) viendront le cas échéant s’ajouter, pour autant qu’ils soient concrets, certains et directement liés à la mesure d’expropriation

    .
    Implications particulières : expropriations spécifiques, limites et perspectives
    Expropriations partielles et caractère indivisible
    Lorsque l’expropriation ne porte que sur une partie d’un bien, une indemnité réparant non seulement la valeur des parcelles enlevées mais aussi la perte de valeur et d’usage du surplus éventuel peut être allouée. La demande d’emprise totale est recevable si la partie restante perd toute utilité normale
    .
    Prise en compte de circonstances spéciales : pollution, démolition ou occupation
    Dans certains cas, la méthode comparative classique est affectée par la nécessité de déduire, par abattement, le coût des opérations spéciales exigées pour le remploi (pollution, démolition, etc.), sur justifications techniques et économiques
    .
    Limitations et exclusions
    Le principe d’intégralité couvre le préjudice direct, matériel et certain, à l’exclusion : – des préjudices « en cascade » ou purement spéculatifs, – des améliorations trouvant leur origine dans une manœuvre en vue d’accroître artificiellement l’indemnisation

    .
    Préjudices immatériels
    La perte morale, psychologique ou le changement de cadre de vie ne donnent pas lieu, sauf exception de trouble de jouissance manifeste, à réparation chiffrée dans le cadre de l’expropriation

    .
    Prise en compte des règles d’urbanisme et des servitudes
    La situation du bien face aux règles d’urbanisme en vigueur à la date de référence est déterminante. De même, les servitudes de droit public ou charges grevant le bien sont prises en compte sur la base de leurs effets objectifs sur la valeur de marché

    .
    Influence européenne
    La Cour européenne des droits de l’homme impose au cadre national de garantir un juste équilibre entre les besoins d’intérêt général et la sauvegarde des droits fondamentaux du propriétaire. Elle inspire la jurisprudence française dans le sens d’une appréciation concrète de l’équité de l’indemnisation

    .
    Synthèse
    Le régime d’indemnisation en matière d’expropriation pour utilité publique est caractérisé par la recherche d’une exacte équivalence, de nature à permettre le rétablissement de l’exproprié dans une situation comparable à celle qui était la sienne avant la dépossession. Le calcul de l’indemnité s’articule autour d’une indemnité principale fondée sur la valeur vénale du bien à la date de référence, déterminée comparativement et ajustée, le cas échéant, par abattement pour occupation, démolition ou pollution. À cette indemnité principale peuvent se cumuler des indemnités accessoires, dont l’indemnité de remploi, calculée selon un barème usuel pour couvrir les frais d’acquisition d’un bien équivalent. La procédure donne la priorité à un accord amiable, le juge n’intervenant qu’à défaut de consensus et statuant dans la limite des prétentions des parties. Enfin, toute indemnisation doit être juste, préalable et effective, sous le contrôle du juge, et à défaut de paiement effectif, des intérêts légaux sont dus à compter de la demande. Le spectre des indemnisations exclut les plus-values spéculatives, restrictions purement personnelles ou améliorations d’opportunité, au bénéfice strict du préjudice direct, matériel, certain et objectivement quantifiable causé par la dépossession.

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