006-Jugement du 06.06.13 – Trouble de jouissance (3/3)
Une TROISIEME décision du 06.06.13 liquide, le 06.06.13, encore, le préjudice « continue et constant » depuis le 28.08.1998, constitué d’un trouble de jouissance mais uniquement pour la période du 05.01.07 au 19.11.09 et du 27.01.11 au 20.10.12, sous la plume d’un artiste dont le raisonnement échapperait à quelques explications si seulement elles étaient susceptibles de permettre de mieux comprendre cette “spoliation” par gens de peu …
Rappel :
La première décision du 05.05.11 : “Déclare Madame Brigitte WALLON divorcée Van de Velde, Monsieur Patrick WALLON, Monsieur Marc WALLON, le curateur à la succession [réputée] vacante de Monsieur Alain WALLON, bien fondés en leurs demandes de dommages et intérêts provisionnels à l’encontre du Département des Landes représenté par le Président du Conseil Général pour violation manifeste de leur droit à conserver pendant la période du 17 janvier 2001 au 17 juillet 2005 la jouissance des lieux expropriés sis 33 rue Victor Hugo à Mont de Marsan et cadastrés section AB n°210 pour une superficie de 1 are et 96 centiares.“
La seconde décision 22.11.12 reprend : “Pour les motifs exposés dans la décision du 05.05.11 à laquelle la présente décision renvoie expressément, suite à la décision du de la Cour d’Appel de Bordeaux du 30.06.04, la prise de possession par la partie défenderesse constitue une violation manifeste du droit des consorts Wallon à conserver la jouissance des biens expropriés. […]
Le total du préjudice de jouissance pour la période du 18.07.2005 au 05.01.2007 est de XXX€. Le Département des Landes représenté par le Président du Conseil Général sera par suite condamné à verser solidairement à Madame Brigitte WALLON divorcée Van de Velde, Monsieur Patrick WALLON, Monsieur Marc WALLON, une somme complémentaire de XXX€ en sus de [celle précédemment liquidée] outre intérêts alloués ennemis réparation du préjudice de privation de jouissance pendant la période du 17.01.01 au 17.07.05 lors du jugement du 05.05.11.
Les intérêts au taux légal de la nouvelle somme de XXX€ seront dus à titre compensatoires à compter du 04.04.2012, date de la première transmission par fax des demandes se rapportant à cette période.
[…]
Sursoit à statuer sur les demandes de dommages et intérêts pour la période postérieure au 05.01.2007 jusqu’à la réouverture des débats…“
Observations « de grande » importance :
« Par des écritures déposées le 28 février 2013, le Directeur Régional des finances Publiques en Aquitaine et du département de la Gironde pris en sa qualité de curateur de la succession vacante de Monsieur Alain WALLON, sollicite de :
– lui donner acte qu’il ne formule pas de demande pécuniaire complémentaire;
– constater qu’il n’a perçu aucune des sommes allouées à l’indivision au titre du préjudice de privation de jouissance et ordonner le cas échéant leur consignation;
– ordonner le déblocage des sommes consignées mais à fin d’une consignation judiciaire ou entre les mains d’un notaire en vue de la liquidation partage de l’indivision;
Subsidiairement,
– rejeter toute demande de déblocage des sommes consignées tant que le partage de l’indivision n’a pas été réalisé;
-rejeter toute demande de condamnation du Directeur Régional des Finances Publiques d’Aquitaine et du département de la Gironde au titre des frais irrépétibles.«
Cette décision exécutoire, visant à réparer le trouble de jouissance pour violation manifeste du droit des expropriés en ayant sollicité la liquidation, d’user de l’immeuble exproprié, jusque dans le mois du paiement de la consignation autorisée, n’est toujours pas réglée le 15.07.17, malgré commandement de payer du 25.06.13 …:
-LA SUITE EN DIRA ENCORE PLUS- …
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Contexte documentaire web
La décision du 6 juin 2013 conclut une série de décisions judiciaires portant sur la réparation du trouble de jouissance subi par les consorts Wallon à la suite de l’expropriation d’un bien sis 33 rue Victor Hugo à Mont-de-Marsan, cadastré section AB n°210. Cette décision intervient explicitement après deux jugements précédents (5 mai 2011 et 22 novembre 2012), chacun ayant déjà reconnu puis réparé partiellement la violation manifeste du droit des expropriés à conserver la jouissance des lieux expropriés pour différentes périodes distinctes, tout en sursoyant à statuer quant aux périodes ultérieures.
D’après l’exposé factuel et la chronologie retenue, ces procédures ont pour origine des difficultés d’exécution et de règlement du préjudice consécutif à la prise de possession litigieuse et différée par le Département des Landes, ainsi qu’à l’absence persistante de paiement des sommes définitivement allouées au titre de l’indemnisation pour trouble de jouissance, en dépit de commandements de payer et de demandes de liquidation judiciaire ou notariale, notamment pour cause d’indivision et de succession vacante .
Analyse approfondie
Étendue de la réparation indemnitaire du trouble de jouissance
La décision du 6 juin 2013 liquide le préjudice jugé « continu et constant » subi par les propriétaires expropriés à partir du 28 août 1998 mais circonscrit ici le trouble de jouissance à des périodes précises : du 5 janvier 2007 au 19 novembre 2009 et du 27 janvier 2011 au 20 octobre 2012. Ce choix fait suite à un sursis à statuer ordonné dans la précédente décision (22 novembre 2012), renvoyant à une réouverture des débats pour les troubles subis au-delà du 5 janvier 2007 .
Cette division chronologique du préjudice, expressément motivée par la succession d’événements d’exécution (ou d’inexécution), manifeste une volonté d’individualisation du quantum des troubles considérés comme indemnisables. La juridiction retient ainsi :
– D’une part, que la violation persistante du droit à jouissance des lieux, en l’absence de restitution ou de consignation rapide de l’indemnité, constitue un trouble grave alléguant à la fois l’impossibilité d’user matériellement du bien et l’indisponibilité pratico-juridique de la créance indemnitaire ;
– D’autre part, que la liquidation du préjudice ne saurait porter que sur les périodes où la violation juridique a été manifeste, notamment au vu des retards d’exécution et des obstacles au paiement effectif .
Par ailleurs, le raisonnement retenu semble s’efforcer de fonder, période par période, la matérialité et l’intensité du préjudice subi : chaque tranche de trouble est sanctionnée par une indemnisation spécifique, expressément liquidée et ajoutée aux indemnités antérieures allouées pour d’autres tranches temporelles .
Fondements et motivation juridique
Comme dans les décisions précédentes, la motivation fait fond sur la « violation manifeste du droit à conserver la jouissance des lieux expropriés ». Ce principe est en cohérence avec la jurisprudence constante relative à l’article 545 du code civil (protection du droit de propriété) et au principe constitutionnel de réparation intégrale du préjudice d’expropriation. La décision relève aussi de la logique attachée à l’article 1er du Protocole n°1 à la CEDH, qui impose que toute privation de jouissance soit réparée de façon « adéquate et effective » .
La juridiction rappelle que le préjudice de jouissance est distinct de la seule indemnité d’expropriation principale, laquelle ne répare que la dépossession patrimoniale mais non les troubles ou dommages consécutifs à l’éviction irrégulière, aux retards d’exécution ou à l’entrave dans l’usage ou la valorisation du bien, pendant le temps des contentieux d’exécution ou des difficultés de partage successoral .
Régime de la liquidation et conséquences procédurales
Ce contentieux révèle, de façon significative, la complexité procédurale pouvant résulter d’un cumul de facteurs : retard de paiement, indivision successorale, désaccords sur la répartition, interventions du curateur à la succession vacante, va-et-vient entre consignation et liquidations partielles, et inertie persistante malgré les décisions judiciaires exécutoire. La décision du 6 juin 2013 montre que le juge veille à :
– Affecter à l’indivision l’ensemble des indemnités correspondantes au trouble de jouissance (en toute période reconnue) ;
– Autoriser la consignation judiciaire des sommes attribuées si la délivrance effective aux bénéficiaires est empêchée soit par l’absence de paiement spontané par l’expropriant, soit par l’impossibilité matérielle de réaliser le partage ou la liquidation successorale .
On observe que le juge répond aux demandes des représentants successoraux ou de l’administration fiscale (curateur de la succession vacante) qui sollicitent à la fois la constatation de impayés, la consignation judiciaire, le déblocage au profit de la liquidation-partage lorsqu’elle pourra intervenir, et le refus de condamnation à des frais supplémentaires tant que le passif de l’indivision persistera .
Ce schéma traduit la capacité du juge de l’expropriation à articuler procédures civiles et hypothèses successorales complexes, sans entraver pour autant le droit indemnitaire des expropriés.
Problématique de l’exécution forcée et de l’inefficacité du règlement
L’extrait mentionne explicitement le constat persistant du non-paiement des indemnités réparatrices, à la date du 15 juillet 2017, malgré la décision exécutoire et l’existence d’un commandement de payer de juin 2013. Il souligne ainsi la difficulté récurrente de traduction pratique des condamnations judiciaires, en raison notamment de la lenteur des paiements par l’expropriant (ici, le Département des Landes), de la complexité de la consignation ou du déblocage des fonds sous la responsabilité d’un notaire ou du curateur successoral, et de la multiplicité des intervenants concernés .
Cette « inertie » procédurale révèle une vulnérabilité des mécanismes d’indemnisation accessoire en expropriation : le bénéfice reconnu juridiquement (indemnisation du trouble de jouissance pour violation manifeste du droit à la jouissance) se heurte à des obstacles d’exécution, souvent prolongés par des procédures d’indivision, de partage ou de curatelle, qui éloignent la réparation effective de la sphère patrimoniale des expropriés .
L’office du juge se limite alors – dans l’attente du déblocage effectif – à ordonner consignation, parfois subordonnée à la liquidation-partage à venir, l’indivision ou la succession faisant obstacle à l’exécution immédiate individuelle .
Illustration d’une jurisprudence rigoureuse sur la responsabilité du préjudice de jouissance
L’approche retenue dans la décision du 6 juin 2013 s’aligne sur la jurisprudence antérieure : ni la personne publique débitrice (Département des Landes), ni la collectivité d’héritiers ou d’ayants droit ne peuvent se soustraire à l’obligation de réparer l’atteinte portée à la jouissance effective des biens expropriés, que ce soit par la privation irrégulière de cette jouissance ou par le défaut d’exécution des décisions indemnitaires.
Le juge précise donc et échelonne la réparation du préjudice en tenant compte :
– Des périodes précises durant lesquelles le trouble de jouissance a été reconnu ;
– Des difficultés propres à l’exécution dans le cas d’une succession vacante ou d’une indivision non liquidée ;
– Des mesures prudentes pour éviter la dissipation des fonds (consignation), tout en maintenant la créance des ayants droit jusqu’au jour où le partage ou la liquidation pourra en permettre le versement effectif .
Par ailleurs, la mention expresse des décisions antérieures et la logique de réparation segmentée – par tranches chronologiques – témoignent d’un contrôle constant de la situation factuelle par le juge, ce dernier adaptant l’étendue de l’indemnisation selon la réalité des troubles persistants ou renouvelés.
Synthèse
La décision du 6 juin 2013 parachève le contentieux indemnitaire né de l’expropriation du bien de la famille Wallon, en opérant la liquidation du trouble de jouissance pour deux nouvelles périodes (janvier 2007-novembre 2009, janvier 2011-octobre 2012), tout en s’inscrivant dans la continuité des deux jugements antérieurs. Elle met en relief la gravité du préjudice accessoire subi par les expropriés du fait du comportement de l’expropriant et des lenteurs d’exécution, ainsi que la complexité liée à la coexistence d’un contentieux civil, successoral et d’expropriation. Malgré les décisions judiciaires, la réparation effective peut être différée en raison de difficultés matérielles d’exécution, d’indivision ou de succession vacante, conduisant à la mesure de consignation jusqu’à liquidation-partage.
Ce cas illustre la rigueur de la jurisprudence sur l’indemnisation autonome du trouble de jouissance en expropriation : la réparation porte sur les préjudices réellement subis du fait de la privation abusive de jouissance et indépendamment de la perte principal du bien – encore faut-il surmonter obstacles d’exécution, partage ou paiement effectif, afin que le droit indemnitaire reconnu prenne une réalité patrimoniale tangible .